Voilà, nous y sommes, Juillet 2015. 150 années en arrière c’est 1865 et cette saison d’été qui va clôturer l’âge d’or de l’alpinisme finira pour Edward Whymper en apothéose par l’ascension du Cervin. L’année précédente fut aussi pour Whymper une année faste. Tout ce qu’il a entreprit a été une réussite. C’est aussi sa première saison de montagne avec Michel Croz comme guide. En 1865 il fait de nouveau appel à lui. Sa soif de conquêtes est tellement grande qu’il a aussi fait appel aux services de Christian Almer le guide Suisse de Grindelwald. Pour parfaire son équipe il fait appel à un autre guide Suisse, Franz Biner. Celui-ci est embauché par Whymper presque uniquement pour servir de porteur et aussi parce qu’il parle Allemand et Français, contrairement à Croz et Almer qui parlent eux, uniquement leur langue maternelle.
Imaginez ! Trois guides pour un client.
On peut effectivement se dire que Whymper avait pour cette année, encore plus que les années précédentes, la ferme intention de tout réussir.
Cette campagne commence en Suisse par la première du Grand Cornier. Pour se rendre à Zermatt l’équipe passe au pied de la Dent Blanche. Bien que déjà vaincue cette montagne les attire. Pendant l’ascension le temps se dégrade et ils arriveront au sommet en pleine tourmente. Avant de franchir la rimaye Croz avait prophétisé que le vent les forcerait à renoncer et avait conseillé une retraite prudente. Whymper avait répondu : « non, mon cher Croz ; vous avez dit tout à l’heure que la Dent Blanche se présente dans d’excellentes conditions, il faut donc absolument l’escalader. »
Whymper décrit encore les choses ainsi : Les guides se redressaient dès qu’ils le pouvaient sans danger, bien que leurs doigts fussent presque gelés. Pas un murmure ne se fit entendre ; le mot de retour ne fut pas prononcé ; tous se hâtèrent vers le petit cône blanc, dont ils se savaient très rapprochés. A la descente les guides personnifiaient l’hiver, avec leurs cheveux raidis et chargés de neige, et leur barbe hérissée de glaçons. Mes mains étaient engourdies et comme mortes. Je priai mes compagnons de s’arrêter un peu. « impossible ! Il faut absolument maintenir la circulation » répondirent ils. Ils avaient raison ; s’arrêter, c’était s’exposer à être entièrement gelé. A la fin nous fîmes l’inventaire de ce qui nous restait des extrémités de nos malheureux doigts, presque entièrement dépouillés de leur peau. Pendant bien des semaines, les douleurs aiguës que je ressentis en tirant mes bottes me rappelèrent l’ascension de la Dent Blanche. Les guides me firent compliment sur la manière dont j’avais effectué cette descente difficile, et je leur rendis également un hommage bien mérité. S’ils eussent montré moins d’énergie et d’union, la nuit nous eût surpris sur ce terrible versant où il n’était pas même possible de s’asseoir. Aucun de nous, j’en suis persuadé, n’eût survécu pour raconter cette lamentable histoire.
Quelques jours plus tard, Whymper s’attaque une fois de plus (C’est sa septième tentative) au Cervin. C’est un nouvel échec. Almer dit à Whymper : Pourquoi ne cherchez- vous pas à faire des ascensions possibles ? Croz insiste aussi pour aller vers le massif du Mont-Blanc car il doit quitter Whymper le 27 Juin engagé par un autre client. Whymper acquiesce.
Ils se rendent dans le val Ferret et feront l’ascension des Grandes Jorasses. Monté en cet endroit pour observer l’aiguille Verte en vue d’une prochaine tentative, Whymper choisi non pas d’aller au sommet mais sur un éperon annexe qui porte à présent son nom. Le mauvais temps est de nouveau de la partie et lassé d’attendre une éclaircie il donne le signal pour la descente avant de pouvoir faire la moindre observation de son prochain objectif. A la descente la troupe échappera de peu à une plaque à vent qu’ils verront disparaître dans une crevasse béante. Ils se rendent ensuite sur Chamonix en passant par le col Dolent. Encore une première.
Croz quitte la troupe engagée avant la demande de Whymper par un autre Britannique : John Birbeck. Celui-ci malade, Croz sera finalement embauché par le révérend Charles Hudson. Pour l’instant il voit partir avec tristesse Whymper vers l’aiguille Verte.
Almer devient le guide chef. Ils réaliseront donc la première de l’aiguille Verte par la voie qui de nos jours porte le nom de couloir Whymper. Ce 29 juin 1865 ils quitteront en fait le couloir assez rapidement pour partir sur la gauche et rejoindre vers le sommet ce qui est actuellement l’arête du Moine. Au retour c’est presque la bagarre à Chamonix avec les guides locaux. Leur montagne emblématique gravie par des étrangers ? Impossible. Les gendarmes devront intervenir et mettre à l’ombre pour quelques heures un des meneurs, Zacharie Cachat guide habituellement sans histoire et qui emmène parfois lui aussi des clients Anglais. Ceci explique d’ailleurs peut être cela. Le résultat final sera qu’une deuxième expédition sera menée sur la Verte à laquelle participera Croz et son client Hudson. Ils iront au sommet de la Verte cette fois par l’arête du Moine.
La Verte sera vaincue une troisième fois en Septembre par la Grande Rocheuse avec les guides Michel A. Ducroz et Michel Balmat.
Le 3 Juillet, Whymper part à 04h00 du matin du Montenvers pour se rendre de nouveau en Italie à Courmayeur et ensuite vers le Cervin. Une autre équipe composée du révérend Girdlestone et deux guides Chamoniard va également vers Courmayeur par le col du Géant. Whymper, lui, prend un autre chemin et bifurque à gauche et va franchir le col de Talèfre. Ils arriveront à Courmayeur vers 17h00 soit 4 heures avant Girdlestone.
Pour se rendre à Breuil ils choisiront ensuite de réaliser la première de la Ruinette et se dirigeront ensuite sur les chalets de Prarayen. Le lendemain ils franchissent le col Cornère et sont à Breuil. Almer et Biner indiquent une nouvelle fois leur aversion de s’attaquer au Cervin. « Tout ce que vous voudrez, excepté le Cervin ! Cher monsieur, disait Almer ; j’irai n’importe où, excepté au Cervin ! » La suite est connue, Whymper fera alliance avec Hudson et retrouvera donc aussi Croz. Ils vaincront le Cervin le 14 Juillet 1865 à 13h40. La descente verra la mort d’une partie de la (trop) importante cordée. Hadow, Croz, Douglas, Hudson sont précipités dans le vide de la face nord. Whymper et les Taugwalder survivent.
C’est donc la fin de l’âge d’or de l’alpinisme. La plupart des sommets majeurs ont été gravis.
Cet été 1865 pas moins d’une soixantaine de premières.
Whymper n’est pas seul. Ce même 14 Juillet voit la première du Piz Buin, montagne de Silvretta en Autriche. Alta-Via y est passé au pied, cet hiver, en mars avec son raid à ski appelé : « Silvretta moderato ». Et oui tout le monde ne marche pas au rythme « Whymper ».
Un des compagnons de cordée de Whymper disparu au Cervin, le jeune lord Francis Douglas a réalisé quelques jours avant l’ascension de l’Ober-Gabelhorn. Nous sommes le 7 Juillet, ce n’est pas une première car le Gabelhorn vient d’être vaincu la veille par A. Moore et Horace Walker guidés par Jakob Anderreg. Ces deux- là étaient avec Whymper l’année précédente. Peu de temps avant ils ont également réalisés l’ascension du piz Roseg en Bernina. Le 15 Juillet ils réussissent aussi l’exploit d’arriver au Mont-Blanc en montant par l’éperon de la Brenva.
Le Cervin vaincu le 14 Juillet est à nouveau gravi 3 jours plus tard par l’arête sud est avec notamment Jean Antoine Carrel.
C’est donc aussi l’époque où l’on commence à gravir les sommets en choisissant des voies nouvelles.
Une page se tourne !
Pour nos prochaines histoires nous avancerons aussi un peu plus vers une époque plus contemporaine. Nous essayerons si tant est que cela soit déjà le cas actuellement de fournir des récits et détails un peu oubliés de nos mémoires.
A bientôt,
Frédéric Cloche
Ps : Faits toujours extraits du livre « Escalades dans les Alpes » de E. Whymper.
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